JEAN AUGUSTE DOMINIQUE INGRES (1780 – 1867)
-« LA GRANDE ODALISQUE » (1814) 91x162 cm.
- Musée du Louvres - Paris
Souvent pompeusement nommé « le Raphaël français », Ingres n’en est pas moins le grand maître du Néo-classicisme en France, et se situe comme peintre « dessinateur » par excellence.
Sa conception artistique se traduisait par un désir ardent d’imiter au plus haut degré la perfection de la « Nature » avec un respect profond des traditions académiques ; cette obsession l’entraînait dans des études préalables longues et approfondies de l’œuvre prévue à réaliser, à l’aide de nombreux dessins préparatoires.
Il a ainsi laissé un nombre considérable de dessins qui permettent souvent de mieux discerner sa démarche et la technique employée, en vue d’aboutir au but final.
Issu de l’école de David, il est grand admirateur de Raphaël qu’il a découvert lors de ses séjours en Italie ; il n’est cependant pas indifférent à Titien qui l’a d’ailleurs inspiré dans sa reproduction de la copie de la « Venus d’Urbino », par contre et logiquement il est plutôt l’opposé de Rubens et Rembrandt .
Il a eu au cours de sa carrière tous les honneurs de son temps, il a même été directeur de la Villa Médicis à Rome ; c’est un perfectionniste doté d’un caractère souvent quelque peu irascible, ayant un haute idée de lui-même, toute empreinte d’infaillibilité. Il éprouve un dédain méprisant pour les doctrines autres que les siennes, son intransigeance lui valut d’ailleurs d’être fort critiqué ; il a même été dit de lui qu’il aurait été plus un grand professeur qu’un grand peintre !
La thématique de son œuvre est relativement limitée, le nu féminin en représentant la majeure partie, et « la Grande Odalisque » en reste l’une des pièces maîtresse.
Ce nu porte bien son nom, une odalisque n’étant ni plus ni moins qu’une servante de harem turc, ce qui donne l’occasion à Ingres de parfaitement exprimer son inspiration teintée d’orientalisme, elle est dévoilée ici dans l’environnement et les accessoires décoratifs de la scène.
Quant aux dimensions du modèle, il est certain que Ingres semble avoir péché par excès de zèle, ayant procédé à une élongation manifeste au niveau du dos, dans une sorte d’outrance anatomique.
Il est d’ailleurs permis de penser qu’il s’agit d’un acte parfaitement délibéré de la part du peintre, compte tenu de la maîtrise et du perfectionnisme de Ingres, ceci dans un but manifeste d’amplifier la courbe du dos pour en mieux faire admirer la pureté des formes.
Les critiques ne le ménagèrent pas lors de la première présentation du tableau au Salon de 1819, l’un d’entre eux ironisant même que « l’Odalisque avait trois vertèbres de trop ! ! !
Malgré le remarquable modelé esthétique de ce nu, il manque singulièrement de chaleur et s’apparente plus à une peinture de type « bellifontaine » suave, plutôt qu’à une réalisation sensuelle à l’attirance irrésistible !