HENRI  ROUSSEAU       (1844  -  1910)

                        Dit le Douanier

 

        -« LE RÊVE »      (1910)     204x299 cm.

 

        Museum of Modern Art    -   New York

 

Commis de bureau à l’octroi de Paris, d’où lui vient son surnom de douanier, Rousseau s’est réellement consacré à la peinture vers 50 ans après avoir pris sa retraite.

Même si son style est souvent qualifié de « naïf » ou de « primitif moderne», il n’appartient à aucune école, et sa technique purement autodidactique est de type intuitive, associée à une imagination complexe et ambiguë.

Doté d’une personnalité ingénue mais malicieuse, il est parfaitement bien parvenu à exploiter les contradictions de son art grâce à une spontanéité qui a séduit bon nombre d’artistes de son époque, qui ne manquèrent pas d’éloges à son égard, ce qui contribuera à son succès malgré les railleries et sarcasmes du public.

Son amour pour les femmes est un peu comme sa peinture, c'est-à-dire empreint d’une innocence généreuse.

 

                     

 

« Le rêve » réalisé la dernière année de sa vie, expose la femme aimée au sein d’une nature exotique et exubérante, ce qui traduit bien l’imagination du peintre. N’ayant jamais voyagé outre-mer il fantasme à partir de ses visites au Jardin des plantes de Paris pour peindre une forêt vierge luxuriante où se côtoient au clair de lune, lions, éléphant, singe et oiseaux manifestement subjugués par la musique du charmeur noir !

Au milieu de ce décor délirant, une femme nue allongée sur un canapé Louis-Philippe est censée être endormie selon le poème de J.J. Rousseau qui accompagnait le tableau lors de sa présentation.

« Yadwigha dans un beau rêve

s’étant endormie doucement

entendait les sons d’une musette

dont jouait un charmeur bien pensant.

Pendant que la lune reflète

Sur les fleurs, les arbres verdoyants,

Les fauves serpents prêtent l‘oreille

Aux airs gais de l’instrument. »

 

Yadwigha semblerait avoir été une femme russe ou polonaise qu’il aurait beaucoup aimé dans sa jeunesse, et dont il avait déjà peint le portrait vers 1904 dans son tableau « Ève ».

Si l’onirisme ne fait pas défaut dans cette œuvre, il n’est cependant pas aisé de discerner qui est en train de rêver, cette femme nue aux yeux ouverts, le peintre lui-même, ou bien le spectateur, tant Rousseau pousse l’ambiguïté à son paroxysme ?

Dans cette peinture « sauvage »,  en dehors de l’atmosphère onirique, la stylisation de la réalité réside ouvertement dans ce nu aux formes généreusement arrondies, à la longue chevelure tressée ondulante, et à la nubilité parfaitement épanouie.

Et sans doute n’y a-t-il pas lieu d’approfondir beaucoup plus loin ……

 

 


 

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