DIEGO VELAZQUEZ   (1599 – 1660)

 

        -« VÉNUS AU MIROIR »   (v.1650)   123x177 cm.

 

        National Gallery  -  Londres

 

 Le « peintre des peintres »,  comme l’avait surnommé Manet après son passage au Prado, a été le grand portraitiste de l’age d’or de la peinture espagnole du XVII° siècle ; il pratiqua son art à la cour de Philippe IV d’Espagne où il avait été nommé « Grand Maréchal » du palais.

De par ses fonctions il avait la responsabilité d’organiser les déplacements du roi et de la famille royale, il était chef du protocole et  également responsable de l’ornement et de la décoration du Palais.

C’est donc dans ces conditions qu’il réalisera ses nombreux tableaux de la Cour d’Espagne, dont « les menines » est resté l’un de ses plus célèbres chef-d’œuvres.

 

                    

 

Mais quelques années auparavant Vélazquez avait réalisé le premier nu de la peinture espagnole : la » Vénus au Miroir »  en prenant, soit dit en passant, beaucoup de risques ; en effet l’Inquisition espagnole punissait ce genre de délit par l’excommunication et le bannissement. Peut-être est-ce à cause de cela que Vélasquez a représenté son modèle de dos seulement, afin de maintenir une certaine forme de pudeur malgré tout.

Ce n’est par ailleurs pas le seul nu qu’il est représenté, mais c’est cependant le seul qui subsiste, les autres ayant malheureusement maintenant disparus.

Certains historiens modernes semblent s’accorder à estimer que ce tableau aurait pu être réalisé en Italie lors de son second séjour dans ce pays ; de toute manière l’histoire de cette toile reste encore relativement mystérieuse, en effet si elle apparaît dans l’inventaire d’un noble de la cour d’Espagne, elle n’atterrira finalement à Londres et n’entrera à la National Gallery qu’en 1906.

Et si cette toile était parvenue d’une manière ou d’une autre à se jouer de l’Inquisition, elle n’échappera pas cependant à une sévère lacération à coup de hachoir de la part d’une « suffragette » fanatique ultra féministe, en protestation du caractère de « servitude sexuelle de la femme» symbolisé par cette femme dénudée ! La toile a été maintenant largement restaurée.

Ce nu féminin fait preuve d’une étonnante modernité par la facture avec laquelle il a été peint ; il n’a de Vénus que le nom classique, en effet il ne parait représenter en rien une déesse antique, mais bien plutôt une femme dans une pause audacieuse d’une grande féminité, dont la cambrure des hanches très inédite lui confère une délicate volupté.

Peut-être est-ce l’influence de Rubens, qu’il rencontre à Madrid en 1628, mais comme ce dernier dans sa toile « la toilette de Vénus », Vélasquez fait lui aussi appel au subterfuge du miroir pour dévoiler de manière très fugace le visage de cette femme, contrastant ainsi passablement avec la précision et la pureté des lignes de ce corps nu à l’érotisme maîtrisé et triomphant.

Cette double exposition du personnage aboutit à une démystification radicale de la Vénus traditionnelle, le tout étant couronné par une somptuosité de la gamme chromatique hors du commun.

 

 

                   


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