FERNANDO  BOTERO       (1932 - )

 

        -« LA TOILETTE »         (1982)       lithographie  143x119 cm.

 

        Collection Quintana  -  Bogota  (Colombie)

 

Cet artiste a jusqu’à maintenant partagé sa carrière entre quatre principaux pôles d’attraction : Bogota dont il est originaire, Paris où il débarqué à l’âge de 21 ans et où il va établir un atelier, New York où il installe également un atelier et qui sera la première ville à le consacrer, et l’Italie où il a découvert le Quattrocento avec notamment Piero della Francesca et Paolo Uccello.

La Colombie n’étant plus pour lui un havre paisible de villégiature, compte tenu de la situation politico économique et de l’insécurité qui y règne, Botero est devenu un « déraciné », ce qui a eu pour conséquence de développer en lui ce cosmopolitisme artistique.

Ces circonstances n’ont pas manqué d’influencer sa peinture au style infailliblement reconnaissable, le situant en dehors de tout mouvement contemporain.

Son moto se traduit par une amplification obsessionnelle du volume des formes aboutissant à un hypertrophisme délibéré des personnages, des animaux et des objets qu’il peint dans des couleurs riches et variées.

Il commente lui-même sa démarche de la façon suivante :

« Un jour que je peignais une mandoline, j’ai dessiné une toute petite ouverture au milieux qui n’était pas en rapport avec la taille de l’instrument, et à ma surprise je me suis rendu compte que la mandoline avait deux dimensions monumentales – le volume et la proportion. ».  (1)  

L’origine de ce déformisme a aussi très vraisemblablement sa source dans l’Art précolombien, qui avait déjà tendance à donner une ampleur démesurée et colossale, dans les représentations mythologiques notamment.

La peinture de Botero aboutit le plus souvent à une certaine forme d’ambivalence avec d’un coté cette préoccupation d’assumer la tradition et l’esprit latino-américain et d’autre part une fonction d’ordre plutôt satirique.

 

 

 

« La toilette » dévoile un peu tout cela à la fois, et  il est clair que le propre commentaire de Botero cité plus haut est ici parfaitement explicite ; le minuscule triangle noir représentant le pubis du nu amplifie de manière monumentale la taille et le volume déjà excessifs de ce corps féminin, lui conférant au passage  une sorte de générosité quelque peu vaniteuse.

 

L’effet de gigantisme éléphantesque et pachydermique est saisissant, et l’énormité des formes si elle ne manque pas d’évoquer l’Art précolombien, illustre également  un style que l’on pourrait qualifier de post-baroque disproportionné, où l’influence de Rubens n’est pas entièrement absente.

 

Enfin les couleurs franches et tranchées ont pour effet, si besoin en était, d’aboutir à une affirmation de la personnalité du sujet tout en accentuant la charnelité du nu.

 

 

(1) Interview réalisé par Ingrid Sischy, et publié dans Art Forum International, mai 1985.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

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